mardi 20 décembre 2011

► THE QUEEN (2006)

De Stephen Frears ; écrit par Peter Morgan.




... Le portrait vacillant


C’est une image de télévision qui ouvre le film : d’emblée la place des médias est mise en exergue dans ce qu’on peut appeler l’affaire dans l’affaire. A savoir la mise en cause du comportement de la famille Royale lors du décès de la princesse Diana. Tout va être affaire de communication pour gérer cette crise et les écrans de télévisons, le côté public, ce que nous avons vu, ponctueront le côté privé, ce que nous découvrons. Le drame de Diana n’est qu’une toile de fond : c’est la confrontation entre deux personnages au fort caractère, la Reine Elisabeth II et son premier ministre Tony Blair qui est au cœur du film. 

C’est l’histoire d’une ascension et d’un vacillement, d’un gravissement dans la tourmente et d’une remise en question. C’est le carambolage de deux époques également et le début du film est exemplaire quant à cette suggestion. Succèdent aux plans des écrans de la télévision, ceux de la Reine (Helen Mirren) dont un artiste peint le portrait. Revêtue de son costume officiel, d’un autre âge mais imposant, majestueux, elle nous offre sa raideur de Reine et son impassibilité. Le peintre fige avec son pinceau cette image froide qui est sur le point de se craqueler, le mouvement du monde s’apprête à mettre en péril ce portrait grave et impérieux. L’autre portrait, celui du mouvement, est consacré à Tony Blair (Michael Sheen), prémisse d’une modernité par laquelle va être percutée la monarchie. 

L’opposition des deux mondes, sans être lourde, parcourt ainsi tout le film : aux intérieurs royaux répondent les intérieurs populaires du domicile du premier ministre, à la chaleur conviviale du foyer répond, par contraste, la froideur des membres de la famille royale. Cette mise à distance des modes de vies, des modes de pensées sera reprise géographiquement puisque la famille royale se mure à Balmoral, en Ecosse, tandis que Tony Blair et le peuple vivent au plus près l’événement et ses conséquences. 

Le problème de communication entre la souveraine et son peuple est à l’image de celui qu’elle a avec son premier ministre : ils ne se verront que deux fois dans le film, au début lors de la présentation puis à la fin, après la crise. Ils se parleront certes tout au long du film mais par téléphones interposés : toujours cette idée de la distance et du caractère déshumanisé de la Reine. 

Ce n’est que seule, et de façon fugace, secrètement, isolée au sein d’une nature loin de la fureur du peuple, qu’elle laissera ses émotions prendre le dessus. Moins des larmes pour la défunte que pour une prise de conscience : celle d’une Reine qui n’a pas vu son peuple lui échapper...


Romain Faisant, écrit le 6/11/2006. 

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